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La migration des idées philosophiques

Bien des idées philosophiques,

perchées sur des fils électriques,

si l’on en juge la saison

préparent là leur migration !

 

Quelles sont drôles, au purgatoire,

les idées folles, les idées noires,

celles qui veulent conquérir

le monde avant de revenir !

 

Alors les rouges iront hurlant

du côté du soleil levant ;

elles partiront le poing dressé

causer aux hommes de liberté !

 

D’autres, le regard pacifique,

se préparent pour l’Amérique,

mais arriveront-elles à temps

pour stopper la course à l’argent ?

 

Les blanches, pour le Moyen-Orient,

déjà revêtent le drapeau blanc ;

sous la canonnade fournie

où construiront-elles leur nid ?

 

Les vertes, toutes en salopette,

portant les maux de la planète,

pondront, je sais, à chandeleur,

la saison des grands prédateurs !

 

D’autres idées se font la cour,

les bleues, celles qui chantent l’amour ;

elles iront au septième ciel

voir si l’amour est éternel !

 

il en est qui traitent de Dieu,

ou bien des femmes, ou bien du jeu,

il en est, bien sûr, qui plaisantent ;

d’autres timides ou qui se vantent…

 

et sans arrêt d’autres rejoignent

les fils, à mesure que s’éloignent

les idées qui ont trouvé leur voie !

d’autres idées prennent du poids !

 

Bien des idées philosophiques,

sur bien des fils télégraphiques

rendront là leur dernier soupir ;

transmise, l’idée doit mourir !

 

Je n’ai rien à faire, et c’est marrant

de donner, sans prendre de gant,

son idée sur la migration

de quelque grands thèmes à la con,

 

de philos extraordinaires

qui révolutionneraient la terre

portant la paix en tous logis,

dont l’homme, hélas, ne se soucie !

 

Et tant la conscience me pèse,

je passe des heures sur la chaise,

le nez vers les fils électriques,

l’œil grand ouvert, l’esprit critique !

 

Un jour, quelque idée jaira

depuis la chaise tout en bas ;

partout elle fera des petits;

 

ce sera mon idée de génie !

La femme ailleurs

Elle cache sous son chignon des bouffées d’oxygène;

chez elle les saisons passées ne sont bien loin,

et quand sur sa masure il fait un temps de chien,

l’oxygène, en étoiles, illumine ses veines ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle est ailleurs, toujours, au bord de la fenêtre,

semblant reconnaître dans les plis de la bise

les manches retroussées, le col de la chemise

de celui qu’elle aimait… et d’un autre… peut-être ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle est ailleurs, toujours, près des flammes mourantes

d’une bûche de chêne trop lourde pour ses bras ;

elle ferme les yeux, puis sourit, ils sont là,

tous, autour de la table, tous l’haleine fumante ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle a le cœur qui bât et le chignon qui gonfle,

un souvenir s’extirpe de sa mélancolie ;

l’oxygène s’écoule, quelques larmes aussi,

et de la chemise entrevue un poitrail ronfle ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle est ailleurs, toujours, lorsque frémit la soupe ;

toujours la même soupe, sur le même trépied !

toujours l’odeur du chou vert, de l’os décharné,

du chêne mêlé à la cendre et l’étoupe ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle est ailleurs, toujours, l’œil sur la broderie,

deux lettres majuscules en haut du drap de lin ;

elle causait de trousseau en un été lointain !

qu’elle paraît petite sur le rebord du lit ;

 

elle est ailleurs !

 

Elle passe ses journées sur sa chaise de paille,

l’esprit vif et le corps aux trois quarts assoupi ;

elle voyage à vélo, elle va danser Mamie,

elle va rire… et vous irez à ses funérailles…

 

ou ailleurs !

 

Elle rira toujours de sa caisse de pin

lorsque vous déposerez vos fleurs en pleurant,

sûre de retrouver par les cieux son amant,

– émue comme au début –

quand de vos lippes rouges vous dépeindrez sa fin !

 

Elle rira toujours, d’ailleurs, elle rira…

d’ailleurs,

n’entendez-vous point les rires de l’au-delà ?

Appel au bonheur

               Si d’un clic droit sur la souris, l’on ôtait de l’esprit de l’homme, toute notion d’Enfer, de Paradis, d’ange, de vierge, de démon, de Dieu sauveur et d’asservissement aux cieux ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, l’idée d’une vie après la mort, l’idée qu’un esprit supérieur vienne guider ses pas, que son destin est fils d’obéissance et qu’il doit donc s’inféoder sous peine “de“ ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, le désir de communier avec le doute et de se livrer corps et âme à la cause entendue ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, qu’il est nécessaire de s’agenouiller, de souffrir pour quémander l’antidote à ses souffrances ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, tout besoin d’oppresser, de mutiler, de violer, de séquestrer, de déporter, de voler, de s’enrichir et de tuer au nom d’un idéal théologique ?

            Si d’un clic gauche sur la souris, l’on insérait dans l’esprit de l’homme, le naturel et la simplicité, l’amour et la paix, l’altruisme ; la bonté ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que l’univers existe depuis quinze milliard d’années ; qu’au début, la terre n’était qu’une boule de lave en fusion avec une atmosphère de vapeur d’eau et de gaz toxiques, qu’en se refroidissant la surface s’est solidifiée en une croûte terrestre, que progressivement la vapeur d’eau s’est condensée pour former des océans dans lesquels des bactéries ont commencées à apparaître et à se développer pour arriver à l’homme? (les plus lointains ancêtres de l’homme, les australopithèques, sont apparus il y a quatre millions d’années).

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, qu’il s’agit là d’une organisation interne résultant d’une coopération entre des cellules ?

qu’ainsi, la vie ne doit pas son existence à la compétition, mais à la coopération ; à l’union ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que l’homme actuel, l’homo sapiens-sapiens est apparu il y a deux cent mille ans et que cela représente juste 0,0013% de la durée d’existence de l’univers ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, l’humilité ?

               Si d’un clic droit sur la souris, l’on ôtait de l’esprit de l’homme, toute vénération à un politique, à un philosophe, à un artiste ; à tout homme public ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, toute acceptation automatique, toute certitude idéologique ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, tout conditionnement, toute résignation, tout moutonnement ?

Si l’on ôtait de l’esprit de l’homme, toute notion de racisme, de différence, d’orgueil, de jalousie, de mesquinerie, de misogynie, d’hypocrisie, de lâcheté, d’irresponsabilité, d’appétit du lucre, d’agressivité, d’arrogance, d’intolérance et de machisme ?

               Si d’un clic gauche sur la souris, l’on insérait dans l’esprit de l’homme, la réflexion logique, l’écoute, la proposition, le discernement et la pensée constructive ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que bien des politiciens et décideurs en tout genre ne sont que pour leurs intérêts personnels et se moquent éperdument de leurs concitoyens, leurs collaborateurs et leurs subordonnés ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, qu’uniquement l’orgueil, le mensonge, le faux-semblant, la combine, la manigance et l’argent régissent le monde ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que lui-même se trompe de combat, que sous un matraquage médiatique trop souvent diversif il chemine à côté de la raison ?

Si d’un clic gauche sur la souris, on insérait dans l’esprit de l’homme, qu’il est des révoltes prioritaires et que s’il est bon de gueuler le pavé c’est au son du poing levé et non de l’accordéon ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que l’heure n’est plus à obéir et se taire, que l’on nous ôte, avec parcimonie, les bienfaits et les vertus de nos révolutions passées ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, que le nouveau drapeau est d’un rouge uni ?

Si l’on insérait dans l’esprit de l’homme, le retour à la raison, la combativité positive, la lutte pour le respect mutuel, l’union et la manière dont on use de la pierre à aiguiser la faux avec amour,

alors, je vénèrerais la souris…

alors, clic gauche / clic droit, demain serait heureux !

L’homme seul

Un ange, sur un monocycle,

traînait une vieille carriole

par la traverse de Villesiscle ;

un petit chemin sans bagnole.

 

Je faisais, “la piquette“ aux doigts,

des bottes de poireaux sauvages

par un après-midi sans froid

où j’étais sorti de ma cage…

 

car je vis seul à la maison ;

alors, je vais, panier au bras,

cueillir les fruits de la saison :

le pissenlit, la fraise des bois…

 

Soudain, quand son timbre tintât,

que ce tintement traversa

 la capuche de ma parka,

je l’aperçu derrière moi !

 

Pour sûr, il avait tout de l’ange !

deux ailes blanches dans le dos,

la “coupe bol“, petite frange,

chapelet sur le sac à dos…

 

il portait l’aube et les basquets,

affichait un sourire malin…

de nuit, il aurait pris un pet

de chevrotine, c’est certain !

 

Voici quelque oiseau migrateur

qui ne se fiait aux étoiles

mais aux panneaux indicateurs,

sur une espèce de char à voile !

 

Où allait-il ainsi accoutré ?

– la question vous paraît étrange ? –

je fis un signe pour l’arrêter,

mais savez-vous ce que fit l’ange ?

 

il disparut à l’instant T,

ange, monocycle et carriole ;

j’en suis encore bouleversé !

 

par la solitude harcelé,

j’avais dû forcer sur la gnole !

Ha bein ça alors !

Comment vous dire,

j’ai…

 

un travail simple,

des objectifs simples,

un chemin de vie, simple,

des envies simples,

des besoins simples,

un compte en banque simple,

des idées de gauche simples,

des idées religieuses simples,

des idées amoureuses simples,

des idées extra planétaires simples,

une maison simple,

un jardin simple,

une voiture simple,

 une table simple,

quatre chaises simples,

un lit simple,

des draps simples,

une couverture simple,

deux lampes de chevet, simples,

un pyjama simple,

des sandales simples,

un réfrigérateur simple,

des mets à l’intérieur, simples,

un appétit simple,

un diabète simple,

un cholestérol simple,

un range CD simple,

des goûts musicaux simples,

une chaîne stéréo simple,

une moto simple,

des bottes de moto simples

des sorties du dimanche, simples,

des balades en forêt, simples,

des restos attitrés, simples,

des envies de poésie, simples,

des envies d’écrire, simples,

des textes simples,

des vêtements simples,

un chapeau simple,

une pipe simple,

du tabac simple,

un sommeil simple,

des rêves simples,

des réveils simples,

des déjeuners simples,

une machine à café, simple,

du café équilibré, simple,

une douche simple,

un savon de Marseille, simple,

un dentifrice simple,

une brosse à dent, simple,

une femme simple,

avec des boucles d’oreille, simples,

du bleu sur les yeux, simple,

du rouge à lèvre rose, simple,

des cheveux noirs, simples,

un travail simple,

des objectifs simples,

un chemin de vie simple,

des envies simples,

des besoins simples,

un compte en banque simple…

pourtant,

  

je ne suis pas socialiste !

Racines

Même si j’étais né là-bas

entre les sabots d’un chameau,

et la soif asséchant mes bras,

et le sable fouettant ma peau,

parmi les regs et les dayas

menant sans cesse le troupeau…

 

pour quelques bruines éphémères

je n’aurais pas quitté le nid ;

jamais n’aurais quitté la terre

que mes ancêtres auraient bénie !

———-

Même si j’étais né là-haut

dans ces maisons de bois teinté

de rouge vif pour avoir chaud,

près d’un fjord où même l’été

les orques et les cachalots

ont la chair de poule et l’onglet…

 

pour quelques soleils éphémères

je n’aurais pas quitté le nid ;

jamais n’aurais quitté la terre

que mes ancêtres auraient bénie !

———-

Même si j’étais né sous l’épaisse

forêt tropicale, où les rais

de lumière serrent les fesses

pour pénétrer la canopée,

à l’heure grave où la tigresse

s’en vient croquer quelques pigmés…

 

pour quelques néons éphémères

je n’aurais pas quitté le nid ;

jamais n’aurais quitté la terre

que mes ancêtres auraient bénie !

———-

Même si j’étais né sur les pentes

lavées de cendres et de fumées,

fraîches moulues de laves ardentes

d’un volcan sans cesse harcelé

par quelque tripe bouillonnante

et des râles en pointillés…

 

pour quelques prairies éphémères

je n’aurais pas quitté le nid ;

jamais n’aurais quitté la terre

que mes ancêtres auraient bénis !

  ———-

mais je suis né dans un vallon

où la violence est quotidienne,

où mes semblables, à l’unisson,

font couler le sang et la haine,

où l’on court à la perdition

sitôt qu’on court à perdre haleine !

 

J’ai préparé mon baluchon

et dois en pleurs quitter le nid,

abandonner ce vert vallon

que mes ancêtres avaient béni !

 

« Fontaine, jamais je ne boirai

ton eau ! »  c’est avec conviction

que du perce-neige au muguet,

de la vendange à la moisson,

sous mon vieil arbre je clamais

cet adage en toutes saisons !

 

Que mes ancêtres me pardonnent

je brûle la plume du nid ;

les vers ont gangréné la pomme ;

 

la pomme rouge du pays !

Les enfants

Ils venaient contre moi, nous mettions la musique,

leur esprit s’égarait en ces landes magiques

qui sorties du vinyle prenaient vie sur les murs,

et leurs bras étaient chauds et leur regard si pur;

 

leur souffle, sur ma peau, comme un parfum sauvage

exhibait la candeur des enfants de leur âge.

Ils aimaient, en suivant les anges dans le ciel,

écouter chaque soir les contes de Noël !

 

Ils venaient se blottir et je ne sais des trois

qui tenait la main de Dieu, mes enfants ou moi !

les anges et les bergères promenaient au plafond

leurs sabots de buis blanc, leurs chiens et leurs moutons !

 

Parfois, sortis d’un rêve, ils me disaient « papa ! »

je n’avais le temps de répondre que déjà

ils chevauchaient Pégase, je chevauchais le vent ;

avec mes deux petits nous étions trois enfants !

 

Comme les flocons au dehors, chez nous voletaient

les perles de bonheur et les bulles de gaieté ;

nous ne brûlions guère de bois à la saison

mais nos longs câlins réchauffaient notre salon !

 

Puis les enfants ont atteint l’âge de raison

et la mode n’est plus aux vieux microsillons …

mais un jour, à Noël, nous nous embrasserons

et chanterons en choeur nos anciennes chansons !

 

Avec eux j’ai grandi, avec eux j’ai passé

tant de moments à croire à l’immortalité ;

avec eux j’ai vieilli et je saurai bientôt

si de croire au divin rend l’homme bon ou sot !

La chose étrange

Cordonnier du verbe, sur un billot de bois

je clouais quelques rimes à du papier de soie,

et le parfum des mots, sous les coups de maillet,

emplissait mes songes de fragrances salées.

 

Ce soir-là, le message n’était pas primordial,

j’ai souvenance d’un texte plutôt banal ;

je clouais donc des rimes, presque par habitude

– ainsi me vient la paix dans ce monde si rude ! –

 

Ce fut la mélodie, le langage des pieds

qui pointa l’œil d’abord sous les coups de maillet,

me donnant l’envie de poursuivre sans répit,

et de fil en aiguille me donnant la pépie.

 

Par les sons et les lettres je me laissais porter,

si bien qu’en quelques strophes, je me vis embarqué,

sans niaiserie aucune, sans calcul et sans ruse,

embarqué malgré moi dans le lit d’une muse !

 

je le précise afin qu’entre nous tout soit clair,

je ne cite pas là quelque être bien en chair,

mais la bouche et les yeux en amande, peut-être,

semblables à ceux des anges lorsqu’ils viennent de naître !

 

j’entends bien une muse au sens propre du terme,

à vous faire dresser les poils sur l’épiderme

tant ses parfums subtils, à nos sens méconnus,

vous laissent imaginer l’air ambiant des nues !

 

J’étais donc là, près d’elle, être flou, je rêvais.

Au vent léger, ma foi, nos baldaquins flottaient ;

elle me contait les fleurs des galaxies lointaines…

dans l’odorant dédale je la suivais, sans peine…

 

quand sous les tilleuls d’une très ancienne place,

d’une constellation au fin fond de l’espace,

je reconnus, devant une absinthe, attablés,

je vous le donne en mille… Baudelaire et Gautier !

 

A la vue de mes potes, mon sang ne fit qu’un tour !

je lâchais la main de la muse aux mille atours

et priais le garçon de nous remettre ça !

mais d’une absinthe à l’autre, il est vrai, l’heure tourna !

 

La muse abandonnée me punit en filant

et je dus rentrer seul, cinq grammes dans le sang !

sans GPS j’aurais voulu vous y voir !

le fait est que je pris le chemin du trou noir !

 

En ces terres isolées, où tout semble pareil,

à des milliers de lieues par delà le soleil,

sans repère à présent, comment faire demi-tour ?

Minuit me sauva, car alors, le front lourd,

 

ma tête heurta d’un coup les rimes et le billot !

droguis dans le salon au milieu des mes maux

je retrouvais mon nid, bleu comme une orange ;

 

comme la poésie est une chose étrange !

Désirs

Ce soir les muses font relâche,

ce soir personne ne cravache,

ce soir les muses n’ont la fibre,

ce soir, enfin, j’ai quartier libre…

 

ce soir je vais rouler ma bosse

dans quelque cul de basse-fosse,

j’entends par là “je vais pieuter“,

j’entends par là “je vais rêver“,

 

j’entends par là “je vais errer“

 au gré de la naïveté

des perles bleues de l’insouciance,

des contreforts de l’inconscience…

 

je vais gueuler, je vais pleurer,

je vais jouir, je vais planer,

je vais sombrer dans l’infini

des enfers et des paradis,

 

je vais retrouver les copains,

les poètes et les putains,

toute la clique d’excentriques

qui me fout le spleen et la trique !

 

puisqu’il n’y a plus de cinéma,

ce soir, enfin, je pars chez moi,

puisque c’est le jour où l’on ferme,

ce soir, enfin, je pars “en perme“ !

 

je pars boire à l’air du pays

des liqueurs de tout acabit,

des liqueurs qui roulent les R,

breuvages révolutionnaires !

 

ce soir je ne devrai de compte,

ni à Dieu, ni au roi, ni au comte ;

ce soir, enfin, pour une fois,

je brillerai de mille éclats ;

 

ce soir, enfin, sans oripeau,

sans étiquette dans le dos,

sans vie, sans âme et sans trépas,

GARRIGOU dans tous mes états

 

je serai moi…et rien que moi !

Bien content

Un vieux plantait un olivier

dans la rocaille de son jardin,

à la sortie d’un patelin

que seule la misère connaît ;

 

où ne viennent que les corbeaux,

le cri lugubre du grand vent,

quelques fidèles revenants

quand le soir ouvre ses tombeaux.

 

Le vieux plantait son olivier

dans la rocaille d’un jardin

où ne pousse que le chagrin

entre l’espoir et le fumier.

 

Tant que quelque force lui restait,

il enfouissait ses prières

sous une grosse motte de terre

et puis le travail terminé,

 

courbé sur sa canne de buis,

de sa vieille bouche édentée

le brave homme laissa échapper

le sourire de l’œuvre accomplie.

 

Un rayon de soleil perça

l’épaisse couche de nuages ;

Dieu devait lire son message.

Alors le vieil homme se tourna,

 

se releva tant bien que mal,

sourit encore et se signa,

puis repartit à petits pas

près du feu lire son journal.

 

Les oliviers poussent aisément,

sans trop d’engrais, dans la rocaille ;

chez nous, c’est vrai, d’un peu de paille

on fait sa couche ; bien content.