Nous sommes sur le seuil de la cave, pensifs,
comme nos songeries la pluie vient de travers
et l’on suit du regard les fleurs de courant d’air,
les voiles d’eau hâtifs et les gouttes de suif…
nous pensons en silence aux choses essentielles,
à ces simplicités, qui, misent bout à bout,
font que finalement la journée tient debout
et font que malgré tout les saisons s’entremêlent !
Pas de violence dans le geste ni le verbe,
pas de violence dans la terre de chez nous ;
nous vivons à l’écart des sirènes et des fous,
nos musiques naissent du soleil et de l’herbe…
nous suivons la charrue d’un œil, tandis que l’autre
caresse la chair brune de la terre tranchée
et nous savons déjà, à l’entendre chanter,
que sera la récolte de raisin ou d’épeautre !
chaque jour c’est le dos du calcaire qu’on tisonne ;
admirez le sillon et sentez sa sueur…
la terre est bonne quand on l’ouvre avec le cœur !
sous l’aria du soc terre et laboureur fusionnent !
La pluie vient de travers, nous prenons un instant
pour voir tomber la vie en rayures obliques ;
nos fleurs du quotidien, simples et magnifiques,
courbent à présent l’échine sous les baffes du temps ;
tant ces lignes de fuite sont drues et aiguisées,
même les chiens mouillés cherchent un toit de fortune !
le temps de lire les gros titres à la une
et de lever les yeux la pluie s’est éloignée.
Nous quittons le seuil de notre cave repris
par ces tâches que nous ne finirons jamais ;
sur les tuiles, à nouveau le soleil vient glisser ;
le temps pour nous d’enfiler les bottes, c’est parti ;
nous devons cultiver les bienfaits de la vie !