Si mon vieil ange gardien veille
à ce qu’il ne m’arrive malheur,
quel est donc cet ange qui veille
à ce qu’il m’arrive bonheur ?
Pour le peu que je lui quémande,
cet oiseau de Dieu fait le sourd !
comme s’il n’était de la bande,
s’il n’avait pour moi quelque amour !
Qu’ai-je donc fait pour lui déplaire ?
Que n’ai-je fait qu’il eut fallu
pour combler son âme princière ?
« Maître Bonheur » a disparu !
Alors je vais à cloche-pied
entre “pas question“ et “peut-être“
et je le hèle à satiété
à travers portes et fenêtres…
mais l’écho de ma voix se perd
dans les couloirs de l’infini ;
un peu comme si Lucifer
m’avait volé la clé de vie !
Moi qui pensais qu’un séraphin
m’avait entré dans son vivier !
sonnez, sonnez tristes buccins,
je suis un être abandonné !
Vous qui peut-être êtes intimes
avec l’un de ces chérubins,
sauriez-vous donc, du clarissime,
tirer quel est le nom du mien…
de sorte qu’en trois exemplaires,
datés, signés et tamponnés,
sous quelque forme littéraire
je lui explique mes volontés ?
Jadis on parlait d’homme à homme
à Dieu, entre hommes ou aux saints ;
depuis la crise du pétrole,
il est bien vrai que la parole
ne vaut plus qu’un pet de lapin !