Les cyprès ne cessaient de pointer vers le ciel
un doigt long d’ironie, d’amertume et de fiel,
les fleurs courbaient la tête, les abeilles rentraient,
les loupiotes de ruches peu à peu s’éteignaient ;
les hérissons ne traversaient plus hors des clous,
les mulots regagnaient leurs rives et leurs trous,
les hirondelles boutonnaient leur martingale,
sous les poutres, les araignées pliaient leurs toiles ;
les grues sur une patte, ignoraient les poissons,
les grues sur deux pattes, cessaient leurs rotations ;
seuls les corbeaux riaient, charognards insolents
qui claquent du bec quand d’autres claquent des dents !
les vieilles tiraient les rideaux de leur cuisine,
sous les fagots les vieux terminaient leur chopine,
les chattes regagnaient leur panière d’osier,
dans les volières plus une perruche ne chantait !
à la sortie des classes, les petites fillettes
montaient d’un geste grave leurs petites socquettes
et leur instituteur, homme sage et prudent,
s’assurait qu’un cheveu ne dépasse du rang !
les cerceaux et les billes n’avaient plus d’ambition,
on eut dit que plus grand-chose ne tournait rond !
les chouettes ne mettaient guère de sentiment
dans la voix et livraient de tristes hululements !
comble du comble, en ces landes où règne le vent,
où les curés et les cornards, aux cerfs-volants
passent la matinée, tout paraissait désert ;
pas une âme qui vive, pas le moindre courant d’air !
le jour s’épaississait; les candélabres éteints,
les grillons assoupis et la fumée du train
qui montait dans un ciel sans ange ni soleil,
on eut cru, je le dis, à un pays pareil
à ces contrées fantômes qui vous glacent d’effroi !
mais je compris enfin le comment du pourquoi !
– là, nul n’aurait pu demeurer indifférent –
là, tout était en berne et c’était évident !
il en est ainsi, quand le peuple mécontent,
un mercredi midi, reçoit son président !