Un jour je partirai laissant mille poèmes
au cœur desquels j’aurai colorié ce que j’aime
et tout ce que je hais, ce que j’espère aussi ;
de tendres anecdotes qui pigmentent la vie.
Quelques uns, je le sais, viendront vous faire rire,
d’autres vous alerter, les derniers vous séduire ;
ceux qui chanteront les louanges de mon pays,
préservez-les, ils sont les larmes de mes nuits !
.. puis, rangez pêle-mêle le vrac sur l’étagère,
mais ne le brûlez pas car ce sont des prières
adressées au Bon Dieu comme aux anges du ciel ;
n’allez pas prendre mes recueils pour des missels !
Ma plume ne ressemble guère à celle d’Hugo
dont la richesse étincelait à chaque mot ;
mes rimes ne sont nées pour traverser le temps
si ce n’est trois mois sus à mon enterrement !
Toujours franc du collier, prêt à rentrer en piste,
j’ai fait ce que j’ai pu d’un plaisir égoïste ;
si j’ai charmé quelques-unes de vos soirées
je cueillais là le verbe mais jamais les lauriers…
je buvais vos sourires et votre main tendue.
Il a neigé, venté, gelé, puis il a plu,
les amis ont viré avec leurs joies, leurs peines,
seuls mes textes, fidèles, sont demeurés les mêmes…
et passent les saisons, et tournent les ombrages,
je signe Garrigou au bas de chaque page,
la pendule du salon s’est enfin arrêtée
et si c’était cela “l’heure de vérité“ ?
La pendule du salon s’est enfin arrêtée,
et si ce n’était là que “l’immortalité“ ?